La naissance d'un enfant est toujours un heureux événement. Durant la grossesse, la femme consulte régulièrement son médecin pour vérifier que tout va bien et éventuellement pour connaître le sexe du bébé. Mais pas en Inde.
En effet ici, les médecins sont passibles d'une peine de prison s'ils dévoilent aux parents le sexe du bébé. Pour garder le mystère ? Par tradition ou croyance religieuse ? Non, la réalité est bien plus sordide. C'est pour éviter l'infanticide. Apprendre que son bébé est une fille est souvent une mauvaise nouvelle pour les parents.
C'est le cas dans beaucoup de pays d'Asie d'ailleurs (j'ai des anecdotes à ce propos quand j'étais en Chine et à Taiwan). Mais en Inde, c'est une pratique vraiment très répandue. L'explication est simple : lors du mariage, la femme quitte le domicile des parents pour s'installer chez sa belle famille. Elle aide alors à entretenir le foyer de sa belle famille et sera là également pour s'occuper d'eux lorsqu'ils seront vieux. Mais pour les parents de la femme, rien. La femme est donc une bouche à nourrir, des dépenses à effectuer pour les études, pour, au final, se retrouver seul sans personne pour s'occuper de soi une fois les vieux jours arrivés (parce que bien évidemment, les pensions de retraite n'existent pas en Inde).
En plus de cela, elle n'amènera pas ou moins d'argent à la maison puisqu'elle aura un moins bon travail et pour les familles le pratiquant encore (ce n'est plus le cas dans la majorité des familles), il faudra payer la dot pour marier sa fille.
Il y a donc de nombreux cas d'infanticide. Un ami français ici me disait que plusieurs de ses collègues lui avaient dit que s'ils avaient une fille, ils la tueraient. C'est donc la raison pour laquelle dévoiler le sexe du bébé est interdit en Inde. Malheureusement, l'Inde est un pays extrêmement corrompu et on peut donc encore, moyennant finance, tuer son bébé.
> Sébastien C.
Sébastien a raison. Quand une fille naît dans une famille indienne, c'est une catastrophe ! Elle sait qu'elle est différente, non pas parce qu'elle a un sexe différent à celui de son frère, mais parce qu'on lui fait comprendre très vite qu'elle est un fardeau. Alors très tôt, elle aide sa mère aux tâches ménagères. Cela la forme à sa future vie de femme quand elle se mariera.
Vers l'âge de 13 ou 14 ans, quand elle devient nubile, la famille prépare une grande fête pour la présenter à toute la famille et aux amis de la famille. Ainsi apprend-on qu'il y a une fille à marier dans une famille. Ma copine reste persuadée que cette fête marque le passage merveilleux de l'enfance à l'adulte. Moi je reste persuadée que c'est une fête terrible pour la jeune fille car si elle devient une femme, elle sait qu'elle va se préparer à quitter sa famille pour vivre dans une famille inconnue. Et dans quelle condition ? elle le découvrira assez tôt. Cette fête de la nubilité perd toute sa signification en France, surtout si elle concerne des jeunes filles nées sur le territoire français.
Et sa sexualité ? Rien ! Elle sait que son ventre doit porter des enfants et surtout des garçons. Comment faire ? Elle l'apprendra le jour de son mariage. Autant dire que cette première fois est souvent très pénible pour la jeune ignorante. Ces premières fois sont souvent des viols déguisés. Alors quand j'entends parler du Kâmâ-sutra et du plaisir, je rigole. Cela reste du fantasme pur et simple pour la femme indienne moyenne. Le plaisir est entièrement secondaire. Son devoir est de donner à son mari un garçon. Bien sûr cela change petit à petit mais ce que je raconte reste encore d'actualité. Même ici en France.
Mais et heureusement, les femmes indiennes qu'elles soient en France ou en Inde se rebellent. Elles aiment avant le mariage, sans pour autant passer à l'acte. En tout cas, le moins possible, pour ne pas avoir des problèmes plus graves.
Les mariages inter-castes s'ils sont rares n'en existent pas moins. Et les mariages inter-religieux aussi.
La virginité est un énorme atout. La preuve que la jeune fille est très respectable, certes, mais aussi que le mari est le premier homme dans sa vie. Une façon aussi pour le mari d'assurer son plein pouvoir sur elle. Cela fait aussi partie de l’honneur de la famille. Si cette dernière a d’autres filles à marier, la virginité de la première fille mariée est une garantie de pouvoir marier les autres filles sans problème.
Voilà je pense tout le problème des filles en Inde. La mentalité doit changer mais comment faire comprendre à des parents subissant la pression des familles ou de l'environnement qu'une fille n'est pas un fardeau ?
Rédigé par : Jer | 19 mars 2009 à 09:01
Oui Sébastien, je crois que nous avions compris ta remarque.
Pour faire plaisir à Charles et, en guise d'information, voici quelques chiffres glanés par-ci, par-là :
- la dot peut constituer jusqu'à 70 % du capital économique des familles.
- entre 1*975 et 1*978, 5200 cas de jeunes épouses brûlées "accidentellement"
- depuis 20 ans, il y a une surmortalité féminine
- aujourd'hui, il manque 60 millions de femmes en Inde, surtout dans le Nord et dans le Nord-Ouest.
- des femmes peuvent subir jusqu'à 6 avortements jusqu'à obtenir un fils
- il y a actuellement 6.4 millions d'avortements/an en Inde, la plupart non déclarés
- à Delhi, il y a 1 viol toutes les 24h. A cela s'ajoutent des viols collectifs
- en 2007, il y avait 800 filles nées pour 1000 garçons
- sur 1 milliard d'êtres humains en Inde, il y a 36 millions d'hommes de plus que de femmes
- le ratio normal : 105 femmes pour 100 hommes mais en Inde, c'est 93 femmes pour 100 hommes
- à Mumbaï, le ratio est de 77 femmes pour 100 hommes
- en 2020, 28 à 32 millions d'hommes ne trouveront pas d'épouse
Alors une question : comment surveiller chaque couple, chaque médecin, chaque clinique ? Il faudrait juste une conscience collective pour enrayer cet état de chose. Et ce sont les femmes qui devront réagir. Tant qu'elles accepteront de tuer leur bébé fille, les hommes ne comprendront pas. A elles de relever la tête.
Rédigé par : Jer | 13 mars 2009 à 18:09
Je ne voudrais pas qu'on interprète mal ce que j'ai écrit. J'ai parlé d'une pratique très répandue mais en pourcentage, elle reste bien évidemment très faible. Je connais beaucoup de filles ici dont les parents étaient heureux d'apprendre qu'elles étaient des filles. La place de la femme dans la société indienne a énormément évoluée. J'ai une bonne amie qui a étudiée 2 ans aux US puis est partie travailler à Bangalore, loin de sa ville natale. Avec la bénédiction (et les encouragements) de sa famille. Bien sûr que tous les indiens ne sont pas prêts à tuer leur bébé si c'est une fille. Mais le pourcentage a beau être très faible, il est non nul et le fait qu'une telle loi existe prouve que le phénomène est non négligeable.
Rédigé par : Sébastien, l'auteur | 12 mars 2009 à 19:29
Intéressant ces échanges de commentaires. Alors que Sébastien, avec l'approbation de Jer (dans un premier temps en tout cas), fait une analyse sombre de la situation des filles en Inde. Elisabeth veut tempérer cette vision (...avec le soutien de Jer). La réalité, je ne la connais pas. L'infanticide des filles est un fait indiscutable en Asie, et particulièrement en Inde (cf. le très connu livre de B. Manier "quand les femmes..."), il vient de loin donc encore fortement inscrit dans les mentalités. Qu'il y ait des progrès, je pense que c'est indéniable mais dans quelle mesure. Encore une fois, des informations chiffrées nous éclaireraient. Ce que je pense en tous cas, c'est que maintenant que l'Inde affiche ses ambitions, elle apparaît brusquement sous les feux. Et qu'à ce titre, elle ne peut se désintéresser de l'image qu'elle donne au monde. C'est peut-être là, une chance pour les filles.
Rédigé par : Charles (du Sari Dévoilé) | 11 mars 2009 à 23:01
Oui Elisabeth, tu as entièrement raison. En Inde j'ai rencontré des femmes qui travaillaient et s'occupaient naturellement de leur foyer, comme ici en France. J'ai aussi vu des pères qui choyaient leur fille, avaient de grandes ambitions pour elle, et qui avec amour et aussi selon son devoir lui constituer une dot afin qu'elle ait un bon mari. J'ai même rencontré des femmes qui ont étudié à l'étranger avec la bénédiction de leur famille.
C'est tout ça l'Inde.
Rédigé par : Jer | 10 mars 2009 à 17:50
Bonjour Sebastien et Jer,
Oui l'infanticide est un terrible fléau en Inde dû à des siècles de tradition et notamment de la dot. Le déclin démographique de la femme a été prouvé.
Mais attention de ne pas tomber dans le travers de la généralité en déclarant que toutes les filles sont tuées à la naissance, qu'elles sont haïes, soumises et "réduites en esclavage".
Beaucoup de filles sont élevées avec beaucoup d'amour, certaines deviennent scientifiques, chefs d'entreprises, commerçantes ou femmes au foyer. J'en ai connues de très épanouies, même modestes.
L'Inde est faite de paradoxes, c'est un pays d'extrêmes... Il ne faut pas tomber dans l'excès de l'un ou de l'autre en affirmant que c'est ça l'Inde. Non il vaut mieux dire que c'est aussi ça l'Inde.
Une femme présidente et des femmes brulées. Plus d'un milliards d'habitants ne peuvent se résumer en des généralités...
Elisabeth
Rédigé par : Elisabeth | 10 mars 2009 à 09:51
Bonjour Sébastien
Oui c'est terrible. Là encore le poids des traditions. Le plus dur c'est de voir que, même dans les familles relativement aisées, cette notion d'avoir une fille est mal perçue. Pourtant une femme instruite peut avoir un bon métier et ramener de l'argent au foyer. Mais dans la tête des gens, "avoir une fille, c'est cultiver le jardin de son voisin" !!!
Mais cet infanticide a des conséquences désastreuses dans certaines régions. Des villages entiers ne sont constitués que d'hommes. Et pour avoir une épouse certains vont les chercher dans d'autres états, ou les achètent (pour les plus riches) ou les enlèvent. Et crois-tu que ces femmes sont choyées ? Mais non elles sont battues, humiliées, réduites en esclavage. Ils n'ont rien compris !!!!
Ah la la ! Que c'est dur d'être femme dans certains pays !!!
Rédigé par : Jer | 09 mars 2009 à 21:57